Il est temps de passer dans le Vert !
16 juin 2009 | Nous venons vers vous dix jours après un succès historique, qui nous a vu dépasser notre score de 1999. Ecolo a gagné les élections, avec une progression spectaculaire en voix et en sièges. Forts de cette victoire, nous avons pris des initiatives à l’égard des autres formations politiques, en commençant par inviter le CdH qui avait le moins perdu et qui a évité de mener une campagne axée sur les caricatures et la lutte PS contre MR. Cela, nous l’avons fait tout en ayant parfaitement conscience de notre rang : nous sommes le 3ème parti, pas le premier.
Ainsi, en démocratie, il faut aussi prendre en compte les autres résultats du scrutin. Le CDH se tasse sensiblement en Wallonie et progresse faiblement à Bruxelles. À l’inverse de ce qui était annoncé, le PS reste le premier parti aussi bien à la Région wallonne qu’à la Communauté française. C’est une donnée non seulement mathématique mais aussi politique, dont il faut démocratiquement tenir compte. Le MR perd légèrement par rapport à son score bas de 2004 (et perd très lourdement par rapport à son score haut de 2007). Cela signifie qu’en Communauté française, le PS est sorti du scrutin avec 10 sièges d’avance sur le MR. C’est une réalité démocratique incontestable.
Ecolo est ancré dans les valeurs de gauche, de manière autonome par rapport au PS. Ecolo est également le porteur de changement, de manière autonome notamment par rapport au MR ou toute autre formation politique. Dans ce cadre, Ecolo a fait campagne sur une série de priorités et de réformes à mettre en œuvre. Nous relevons entre autre l’énergie, la mobilité et l’environnement. Mais il y a aussi la réorientation économique, l’emploi, les solidarités et l’éducation. Et enfin, la gouvernance.
À travers les contacts que nous avons pris cette semaine, nous avons cherché les points de ralliement avec les différents partis. Nous avons pu mesurer des ouvertures du PS et du MR, de façon variable, sur une série de points. Le MR a logiquement fait plusieurs propositions séduisantes, tout en ayant aussi ses sujets de prédilection (comme son rapport aux finances publiques). Des espaces ont ainsi été identifiés en ce qui concerne l’environnement. Pour développer et maximiser des investissements massifs dans un grand plan d’isolation des bâtiments aussi bien publics que privés, les choix programmatiques opérés par le PS et le CdH se révèlent potentiellement en phase avec les propositions d‘Ecolo. C’est également le cas pour le développement des énergies alternatives, en lien avec l’Etat fédéral et pour le soutien affiché aux transports publics. Nous avons la garantie d’amplifier le plan Marshall à travers un 6e pôle axé sur les filières vertes. La transversalité des politiques dans le sens d’un développement durable est aussi incontournable.
A côté de cela, le PS partage plusieurs lignes politiques avec Ecolo, notamment en ce qui concerne les solidarités. Le choix d’une alliance avec CdH et PS permettrait dès lors de maintenir la garantie d’un filet social pour toutes celles et ceux qui risquent de rester au bord de la route, dans une période de crise particulièrement dramatique.
Enfin, sur l’éthique et la gouvernance, les engagements d’ouverture faits tant par le PS que par le CdH sont apparus significatifs. Les offres du MR n’ont en tout cas pas permis de faire la différence dans ce domaine. Il est vrai que la coalition Jamaïcaine n’atteint pas la majorité des 2/3 nécessaire pour mettre en œuvre plusieurs réformes. Il faut aussi observer le paysage des cumulards wallons, où le MR vient largement en tête avec 15 de ses 19 parlementaires exerçant dans les exécutifs communaux (échevins ou bourgmestres), suivi par le PS avec 21 sur 34 et par le CDH, avec 5 sur 14. Or, dans cette phase préalable, le PS a accepté plusieurs éléments-clé en gouvernance, qu’il faudra développer mais nous permettant d’attendre une réforme en profondeur d’un certain nombre de pratiques politiques en Wallonie.
Il faut faire fonctionner l’ensemble de la dynamique : Communauté française, Wallonie et Bruxelles. Comme dit avant les élections et dans notre programme, nous avons en effet la volonté de renforcer la Fédération Wallonie-Bruxelles. Ce projet est logiquement plus facile si, dans l’hypothèse où cela est politiquement possible, les entités fédérées fonctionnent dans un schéma symétrique. Ce qui serait du reste une première dans l’histoire de nos institutions francophones.
Dans ce cadre, il faut également prendre en compte la situation bruxelloise, où nous sortons d’une coalition à laquelle nous avons participé ; qui a, selon nous, fait un travail important et qui grâce au score d’Ecolo a été renforcée par les électeurs (avec une modification dans ses rapports de forces internes, à notre avantage). En liant Wallonie et Bruxelles, nous avons aussi une clé numérique dans les scénarios à 3.
Considérant l’ensemble de ces éléments objectivés, le Conseil de Fédération d’Ecolo a décidé hier d’ouvrir des négociations pour tenter de former avec le PS et le CDH une coalition Olivier en Communauté française, en Région wallonne et en Région Bruxelles-Capitale. Parmi les partis démocratiques, il n’y a ni diable ni bon dieu mais des partis qui sont ou ne sont pas prêts à faire des pas dans la bonne direction. En fonction de cela, des résultats des élections et des dispositions des uns et des autres, l’entrée en négociation pour un Olivier s’est imposée.
Cependant, l’ouverture de ces négociations est assortie d’au moins trois conditions. Nous entrerons en négociation mais cela ne signifie pas que nous aboutirons. Il y a là une obligation de moyens, et non une obligation de résultat. Nous mettrons évidemment toute notre énergie pour essayer de les faire aboutir. C’est la règle. Mais pas à tout prix. Nous porterons avant tout nos exigences de contenu. Nous devrons ainsi, notamment, avancer significativement par rapport à l’ensemble de nos priorités environnementales, sociales, économiques, éducatives. Nous devrons aussi, évidemment, concrétiser les engagements de réforme des pratiques politiques, en particulier en Wallonie. Ce n’est que si les accords auxquels nous pourrons arriver sont assez forts que nous les présenterons en Assemblée Générale.
Le pouvoir n’est pas une condition de survie pour Ecolo, mais un moyen. Le changement est par contre une condition pour Ecolo, car c’est notre objet social et politique. Nous pensons qu’il est important de travailler dans une symétrie entre la Communauté française, la Région wallonne et la Région Bruxelles-Capitale. Cela signifie donc aussi, si ces projets de coalition Olivier aboutissent, que nous solidariserons nos participations, dans l’esprit de la Fédération Wallonie-Bruxelles..
Même si personne n’en doutait, Ecolo a mesuré cette semaine les spécificités d’une série de ses priorités et l’originalité de son projet politique. Ecolo et Groen ! sont bien les seuls écologistes en Belgique. Ecolo continuera donc à agir de façon tout à fait autonome de tout autre parti dans les semaines, mois et années qui viennent. Une éventuelle participation ne constituerait qu’un levier supplémentaire – et par définition provisoire – pour porter nos combats.
Les défis sont immenses et passionnants. Il est temps de passer dans le vert !